Il est 12 heures. Sur le portail du foyer des migrants africains de la rue Saint-Just, dans le 17e arrondissement de Paris, on observe en cette journée ensoleillée de juillet des va-et-vient entrecoupés d'échanges de salutations en langues africaines (Bambara, Peul, Wolof, Soninké)
sous un décor qui rappelle les rues de Bamako ou celles de Dakar. Là, quelques jeunes sans-papiers pour la plupart, sont assis devant leurs étalages. Plus loin, à l'intérieur, d'autres dégustent des plats africains (Thiebou
Jën, Mafé, Yassa) dans un brouhaha.
Boubacar explique
Boubacar Cissoko, la trentaine passée, est un Malien établi en France depuis 1998 après un séjour de plus de 10 ans en Côte d'Ivoire. En attendant une régularisation qui
tarde à venir, Boubacar exerce un petit commerce de détail (jus, bonbons, sucre, dattes, cigarettes, cola, arachides etc.). Il nous livre ses
impressions :
De
nombreux jeunes comme Boubacar vivent dans cet immeuble en attendant des
lendemains meilleurs. Ils bénéficient de l’accompagnement social de l’Association Coallia, ex-AFTAM (Accueil et formation des travailleurs africains et malgaches)
dont le slogan « Pour l’insertion, vers l’autonomie » évoque la
préoccupation majeure de ces personnes vulnérables.
Problème de régularisation
Outre
la précarité des conditions d’hébergement, ces jeunes immigrés africains se
sentent souvent ignorés ou méconnus des habitants des environs et éprouvent
d’énormes difficultés pour régulariser leur situation. « Nous n’avons pas
encore trouvé de papiers !», ce refrain est entonné par la plupart d’entre
eux en raison du durcissement des conditions d’accueil et de séjour des
étrangers non-européens en France.
Or, ces « papiers » tant attendus ouvrent les portes du boulot donc du bien-être social. En effet, ils aspirent à une vie digne avec l’espoir de recueillir suffisamment de revenus pour pouvoir participer au développement de leurs localités. « C’est une honte pour moi de rentrer au pays sans réaliser ce rêve », explique un jeune sénégalais.
Or, ces « papiers » tant attendus ouvrent les portes du boulot donc du bien-être social. En effet, ils aspirent à une vie digne avec l’espoir de recueillir suffisamment de revenus pour pouvoir participer au développement de leurs localités. « C’est une honte pour moi de rentrer au pays sans réaliser ce rêve », explique un jeune sénégalais.
Vie communautaire
L’habitat constitué en
dortoirs ou chambres individuelles exigües en dit long sur les conditions de
vie de ces jeunes migrants qui ont fui le chômage et la misère pour un eldorado
encore imaginaire. La plupart occupent les chambres de leurs aînés, anciens travailleurs migrants rentrés au pays. Ils vivent en communauté, recréant du
coup leur mode de vie africain, mangent leur cuisine traditionnelle, pratiquent la religion musulmane et discutent autour d’un
café ou d’un verre de thé à la menthe.
Ces foyers, qui abritent des travailleurs migrants, sont des logements sociaux construits en France dans les années 50 pour héberger principalement les Maghrébins et
les Africains du Sud du Sahara. Héritiers de la politique de logement
philanthropique des travailleurs isolés, les foyers ont servi de mode de
logement privilégié pour ces étrangers qui vivent dans la précarité.
L'intégration des migrants
Celui de Saint-Just avait été construit 1965 pour accueillir des jeunes délinquants avant d'être rénové en 1983 pour devenir un foyer de migrants. Il laisse
place aujourd’hui à une « résidence sociale » où vivent 167 résidents
officiels avec des chambres de 2 à 3 lits, qui accueillent parfois plus de personnes. La plupart sont des jeunes venus
essentiellement du Mali mais aussi du Sénégal, de la Mauritanie, de la Côte
d’Ivoire et de quelques pays du Maghreb.
Ils
hébergent aujourd’hui une clientèle très diversifiée, comportant même quelques Français. Ces établissements sont aujourd'hui aussi subventionnés par l’Etat et
ses démembrements pour favoriser l'intégration des résidents par l'offre d'un
logement et d'un « accompagnement social » souvent insatisfaisant. Mais leur adaptation à cette
nouvelle mission est difficile : beaucoup sont vétustes et insalubres,
dans l'attente de réhabilitation, tandis que des conflits opposent encore
régulièrement clients et gestionnaires.
Malgré
leur situation de précarité, les jeunes migrants de la résidence sociale de la
Rue Saint-Just continuent de garder espoir et de croire à l’amélioration de
leurs conditions de vie. « Avec l’aide de Dieu, j’obtiendrai peut-être un
jour mes papiers pour enfin réaliser mon rêve : rentrer au pays après plus
d’une décennie d’exil en France.»
Dia Abdoulaye
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